Point de vue

Psychanalystes, encore un effort si vous voulez être républicains…, par Michel Onfray

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Socrate a raison, ô combien !, d'affirmer qu'il vaut mieux subir l'injustice que la commettre. Dans le flot de haine qui a accueilli un livre d'un million de signes qu'on n'aura pas eu le temps de lire vraiment pour le critiquer dignement, j'aurais au moins eu la satisfaction d'opposer ma décence et ma retenue en ne tombant pas dans le caniveau où d'aucuns souhaitaient me conduire.

Pour ma part, en effet, je n'ai traité personne de nazi, de fasciste, de pétainiste, de vichyste alors qu'il m'aurait été facile de souligner le paradoxe qu'il y a à m'invectiver avec pareilles insultes pour sauver Freud qui , lui, a manifesté sa sympathie pour Mussolini et l'austro-fascisme du Chancelier Dollfuss, avant de travailler avec les envoyés de l'Institut Göring pour que la psychanalyse puisse continuer à exister dans un régime national-socialiste ; je n'ai pas eu non plus recours aux facilités d'une psychanalyse sauvage de tel ou tel de mes adversaires pour attaquer sa vie privée, salir son père ou sa mère, stigmatiser son enfance comme il a été fait à mon propos ; de même, je n'ai pas utilisé les nombreuses informations qui m'ont été données depuis par d'anciens patients sur le comportement délinquant et délictuel de certains analystes très en vue à Paris qui utilisent le divan d'une façon qui pourrait les conduire en correctionnelle si les victimes osaient parler ; enfin, je n'ai pas effectué d'attaques ad hominem, tout ceci est vérifiable.

QUANT À L'ARGENT, QU'ON ME PERMETTE DE SOURIRE

On a cru voir dans un livre qui d'ores et déjà est un succès de librairie une stratégie médiatique de ma part sous tendue par un goût de l'argent ! Faut-il croire qu'en plus de leurs vices déjà bien connus les journalistes soient serviles avec un philosophe qui ne dispose d'aucun moyen de nuire comme ils le sont habituellement avec les grands de ce monde , les politiciens en particulier ? Les ministres ou le président de la République convoquent la presse, qui accourt, mais elle ne se déplace pas pour un philosophe qu'on s'évertue en même temps et sans craindre la contradiction à présenter comme un négligeable "penseur du bocage normand"… Elle est tout juste dans son rôle qui consiste à arriver après, car la rumeur est la seule maîtresse du journaliste. Le crépuscule d'une idole est mon cinquante troisième livre, combien ont été des succès de librairie ? Combien de livres ai-je publié sans bénéficier d' un seul papier dans la presse, sans une seule invitation à la télévision, ou à la radio ? Soyons sérieux…

Quant à l'argent, qu'on me permette de sourire : la création de l' Université Populaire de Caen en 2002 que j'anime bénévolement depuis huit années avec des amis eux aussi bénévoles, celle de l'Université Populaire du goût d'Argentan depuis 2006, sans parler d'autres activités gratuites que je ne vais pas ici détailler, montrent qu'en effet, c'est le lucre qui me guide ! J'assure vingt-et-une séances chaque année, chacune est constituée de deux heures, la première est un exposé qui me demande environ une trentaine d'heures de travail pour lequel je ne suis pas payé. Faudrait-il que je renonce aussi à publier ce cours et à vivre des droits d'auteur que m'accordent les lecteurs qui achètent mes livres ?

Car ce texte de plus de six cent pages sur Freud, rappelons le, est issu de ma huitième année de cours à l'UP de Caen. Il n'est pas question pour moi de faire un petit commerce lucratif de ce personnage dans les années à venir.

Ici comme ailleurs, certains me prêtent des travers qui sont les leurs ou qu'ils auraient à ma place. J'ai commencé mon cours en 2002 avec Leucippe et Démocrite, personne ne me reprochait alors de vouloir faire de l'argent ! J'ai continué l'année suivante avec les gnostiques licencieux, les Frères et Sœurs du Libre Esprit, puis plus tard avec les libertins baroques : des sujets racoleurs pour engranger de substantiels bénéfices ? L'an dernier il était question de Jean-Marie Guyau : pour me remplir les poches ? L'an prochain, je réhabiliterai le freudo-marxisme contre la psychanalyse freudienne : là encore pour remplir mon portefeuille ? Après dix années de labeur, j'aurais mené à bien mon travail de Contre histoire de la philosophie dans un séminaire tenu en Normandie, sans gagner d'autre argent que celui des droits d'auteur de mon cours. Je ne détaillerai pas combien de refus j'ai signifié de faire mon UP à Paris pour de l'argent sonnant et trébuchant…

L'UP, UN LIEU DE DÉBAT

Cette Université Populaire est ma création. Des amis m'ont apporté leur concours dès la première année. Nous existons depuis huit années. Aujourd'hui, il existe dix-sept séminaires – dont un de psychanalyse. En 2002, j'avais rencontré un psychanalyste de Caen pour lui proposer d'enseigner les grands concepts de sa discipline. Il a refusé de s'associer bénévolement à cette aventure. L'année suivante, j'ai sollicité Françoise Gorog qui, avec son équipe de Sainte-Anne, a assuré bénévolement elle aussi, quatre années de cours. L'an dernier, j'ai demandé à Myriam Illouz, psychanalyste, ( la compagne de Jean-Yves Clément, un ami de plus de vingt-cinq ans qui anime pour sa part un séminaire musique), d'assurer ce séminaire.

Car l'UP est un lieu de débat : je n'ai jamais caché mon athéisme, et pour cause, le Traité d'athéologie témoigne, toutefois, à ma demande, une amie catholique pratiquante qui enseigne également au séminaire de Caen assure un cours de littérature contemporaine ; je n'ai jamais fait mystère de mes positions de gauche antilibérale, mais un autre ami, libéral affiché, propose un séminaire d'idées politique , et ce depuis la première année ; je consacre mon travail de cette session 2009/2010 à Freud, et, en même temps, on peut assister à un cours de défense et illustration de la psychanalyse. Car le libertaire que je suis n'aspire pas à une UP dirigée de main de maître idéologique par un gourou : dans notre aventure, c'est l'autonomie, sinon l'autogestion qui fait la loi. Je crois aux vertus du débat, du dialogue et de l'échange afin de solliciter la pensée critique des auditeurs. Je n'aspire pas à ce qu'on pense comme moi, mais qu'on s'interroge et réfléchisse à partir des propositions faites par l'UP, dont moi parmi d'autres.

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Le philosophe Michel Onfray.
OLIVIER ROLLER
Le philosophe Michel Onfray.
Vos réactions
  Moi je ne soutiens pas Freud, je fais une allergie à Onfray l’imprécateur. Je trouvais déjà dépassée la grille de Freud en 1970. En attendant, je ne vous souhaite pas d’avoir pour voisin un psychanalyste, intolérant à tout bruit et manifestation
de vie, de joie ou de chagrin: seule la paix des cimetières semble correspondre à ce qui est exigé, d’un ton peu amène. Alors Onfray a peut-être raison, au fond l’injonction semble leur fond de commerce et l’être vivant leur ennemi. Curieuse pulsion!  

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